BROWNOUT ... PHILIPPIN !

Brown out aux Philippines, cela se traduit par blackout en anglais, donc brownout est du philiglish. 

Lorsque vous demandez aux Philippins pourquoi ils emploient brownout en lieu et place de blackout, ils vous répondent que c’est parce que les pannes de courant ici ne durent jamais très longtemps et que donc tout n’est pas complètement noir, mais plutôt marron. Il fallait y penser.

Néanmoins j’ai le souvenir de brownouts qui ont tout de même durés trois semaines !

Après le passage d’un typhon me direz-vous, oui peut-être, mais trois semaines tout de même.

Lors de notre arrivée à Ternate, il y a plus de quatorze ans de cela, les brownouts, comme ils disent, étaient fréquents. Il ne se passait pas un mois sans que nous ayons une ou deux coupures qui pouvaient durer la journée, parfois une partie de la nuit. Ceci en dehors des passages des typhons, lesquels nous laissaient généralement sans courant électrique pour une petite semaine... si le petit dernier était passé relativement loin et jusqu’à deux ou trois semaines s’il nous était passé dessus.

De plus, chaque mois, plus précisément en début de mois et de préférence un dimanche, l’électricité nous était coupée du matin dix heures jusqu’à la tombée du jour vers dix-huit heures. Ceci étant destiné à rappeler aux mauvais payeurs qu’il était temps de régler leurs factures en retard.

Intéressant de savoir que les bons payeurs étaient également pénalisés, pas de remises spéciales pour ceux qui payaient en temps et en heure, par contre ils bénéficiaient de la coupure du dimanche.

De plus j’estime que nous étions doublement pénalisés. En effet le système philippin de facturation de l’électricité part du fait que plus vous consommez, plus vous payez ! Ceci afin de faire bénéficier les plus pauvres, ou censés l’être, ceux qui consomment moins de cent KW par mois, d’un tarif préférentiel.

Pour couronner le tout, nous payons un pourcentage pour les prestations ; transmission, distribution, location du compteur, relevé du compteur, etc. qui est proportionnel à la consommation. Plus je consomme et plus  je vais payer pour que l’on relève mon compteur, ce qui de nos jours s’effectue quasi automatiquement aux Philippines.

Cerise sur le gâteau, nous payons également, au pourcentage, les pertes. C'est-à-dire l’électricité qui est détournée, volée dirons nous. Plus je consomme et plus je paye pour les voleurs !  

Système loss qu’ils appellent cela. Sur une facture d’un montant total de 4.223, je paye 225 pesos pour le système loss. La chasse aux tricheurs s’est accentuée ces dernières années, nous avons connu des années avec un système loss qui dépassait les 10 % du montant total de la facture ; de nos jours nous sommes passés à cinq pour cent.

Quelques mois après notre arrivée à Ternate, compte tenu du fait que les brownouts étaient souvent au programme, nous avons fait l’achat d’un générateur. Pas un gros modèle, un petit 2,5 KVA, de quoi alimenter le réfrigérateur, le téléviseur, l’ordinateur et d’avoir quelques ampoules qui puissent nous éclairer après le coucher du soleil. 

Le coût à l’époque, de l’ordre de 17.000 pesos pour un modèle de bas de gamme, un chinois. Le problème, il faut le faire tourner régulièrement, même s’il n’y a pas de brownout et de plus il consomme un litre d’essence à l’heure.

Donc un rapide calcul nous donne, si nous faisons tourner le générateur six heures par jour, six litres d’essence.
Avec la maintenance nous arrivons à € 1 de l’heure, donc € 6 par jour pour six heures de fonctionnement.
Si le brownout perdure pendant une quinzaine, cela va nous coûter € 90, pour seulement six heures d’électricité par jour. Pas vraiment donné !

De plus notre générateur n’est pas insonorisé, je devrais même dire qu’il est particulièrement bruyant. Nous souhaitons rester en bons termes avec nos voisins et pour ce faire évitons de le faire fonctionner la nuit.

Compte tenu de la tendance qui semble se dessiner, nous sommes plusieurs expats à étudier la possibilité de mettre en place des panneaux solaires. Maintenant la chose n’est pas aussi simple qu’elle y parait, même si nous disposons du principal ingrédient, à savoir le soleil.

Ces dernières années, dans notre petit coin tout du moins, les brownouts ont été de moins en moins fréquents.

Cette année, quatre petits jours pendant et après le passage de Glenda, un typhon de catégorie quatre qui nous est littéralement passé dessus. Quelques brèves coupures d’une ou deux heures, pour la maintenance et l’entretien des lignes et c’est tout. Il est donc logique de se poser la question, faire ou non un investissement dans un générateur qui ne servira que quelques jours par an ?

Oui, mais…

Vous devez vous demander pourquoi je vous parle de brownouts, de générateurs et autres panneaux solaires, alors que je vous dis que nous avons de moins en moins de coupures d’électricité sur Cavite et ce, même après le passage d’un typhon ?

Tout simplement du fait que la situation pourrait rapidement changer.

Les projections suggèrent que le pays pourrait rapidement se trouver en situation de pénurie de courant électrique. C’est déjà le cas dans plusieurs provinces philippines. Les centrales sont pour certaines obsolètes, d’autres hydrauliques manquent d’eau pour les faire tourner et surtout les nouvelles installations, en cours de construction ou en projet, risquent fortement de ne pas suffire. Le pays est en plein boom économique et la population a largement dépassé les cent millions d’habitants, donc la demande de courant électrique est en très forte augmentation.

Les projections de la consommation électrique pour les prochaines années démontrent que les besoins seront largement supérieurs aux capacités installées ou en cours d’installation.

 C’est une situation que le pays a déjà connu durant les périodes de Marcos et de Cory Aquino.

En 2008, l’île de Mindanao a subie une très forte pénurie de courant électrique. La conjonction de plusieurs facteurs : centrales en panne ou en réparation, pluviométrie trop faible pour l’alimentation des cours d’eau et des barrages et forte augmentation de la consommation. 

De nombreuses  villes de l’île se sont retrouvées avec des coupures journalières qui pouvaient atteindre quatre à six heures. Jusqu’à douze heures pour des villes comme Butuan et Gensan.

Même Davao n’a pas été épargnée en 2008 et pourtant la ville possède sa propre centrale électrique qui fonctionne au diésel. Néanmoins, des coupures journalières, des délestages qui duraient environ deux heures ont été enregistrées cette année là.

Si de 2008 au début de 2014, Davao City n’a connue que de rares coupures, il n’en a pas été de même sur l’ensemble de la grande île ; nombreuses sont les villes qui ont connu et qui continuent à faire l’expérience de périodes sans électricité, aussi bien de jour que de nuit.

Un ami qui vit à Davao m’a informé que, depuis le début de l’année 2014, la ville subie des coupures tournantes de courant dont la durée peut aller jusqu’à six heures par jour. 

Généralement quatre heures durant la journée et deux heures la nuit, dans son quartier tout du moins. Pour lui qui gagne sa vie en travaillant sur le net c’est un réel problème, son travail s’en trouve grandement perturbé. Il a en permanence cinq ou six ordinateurs qui sont en fonctionnement et des employés qu’il paye au mois. 

De plus il s’agit d’une personne qui tolère difficilement la chaleur et qui vit la plupart du temps en air conditionné. Il m’a également fait savoir que la situation est pire dans le reste de l’île, Davao étant partiellement épargnée du fait de sa centrale diésel.

Imaginez que vous ayez un business qui demande l’utilisation du courant électrique et que vous soyez privé de celui-ci durant six heures, sur les huit que compte une journée de travail.  Vous allez rapidement faire faillite.

C’est la situation à laquelle doivent faire face de nombreux entrepreneurs de Mindanao.
La seule solution, si la situation devait perdurer, l’installation d’un générateur électrique.

Mais pour avoir un générateur de qualité, relativement silencieux et d’une puissance de 3000 à 5000 watts, il faut compter entre 3000 et 5000 US$, entre 130.000 à 200.000 pesos. Plus l’installation et il faut prévoir un budget pour le carburant nécessaire au fonctionnement du moteur !

C’est une situation à laquelle il va falloir se préparer.

Sauf à avoir une très forte baisse de l’activité économique dans les prochains mois, ce sont plusieurs provinces philippines qui devraient avoir à souffrir de délestages dans la fourniture de courant électrique.

J’ai plusieurs amis, répartis sur l’ensemble du territoire, qui m’ont fait part de coupures fréquentes dans leurs secteurs. Mindoro, Bicol, Camarines Nord et Sud, etc.

Pour ceux qui envisagent de faire construire, pour ceux qui souhaiteraient monter un business, renseignez vous au préalable, consultez votre fournisseur local.

Lors d’une coupure d’électricité, il faut savoir que dans la demi-heure qui va suivre la pression de l’eau de la ville va fortement diminuer. Après trente minutes, plus une goutte ne coulera de votre robinet. Remplissez seaux, casseroles et autres récipients avant qu’il ne soit trop tard. Sans eau dans les toilettes, vous risquez de vous retrouver rapidement dans la M…. !

Prévoyez une (ou plusieurs) batterie de rechange pour votre (ou vos) laptop ainsi que pour vos téléphones portables, un back-up pour votre Routeur, PC et WIFI. Quelques lampes torches. Une lampe tempête qui fonctionne au Kérosène, un poste de radio sur piles et des piles de rechange, etc.

Une ou deux coupures de courant électrique de quelques heures, poussons jusqu’à une dizaine par an, ne nécessitent pas d’investir dans un générateur (groupe électrogène). Maintenant si les coupures sont journalières et durent plusieurs heures… en fonction de votre situation, peut-être serez-vous amenés à investir dans un système palliatif.

Éolien, solaire, hydraulique, moteur à explosion ? Je vais y revenir dans un prochain billet.

Mais, prenez vos précautions et attendez-vous à des coupures de plus en plus fréquentes dans les prochains mois, voire dans les prochaines années.

Expériences, avis, critiques et commentaires, comme d’habitude sont les bienvenus.

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